Fondation Moi pour Toit

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Le cri du coeur du fondateur
Par: Fondation Moi pour Toit
Dans:Presse
Le 26 Fév 2010

Christian Michellod lance un appel pour ses «enfants» de Colombie. Les temps sont difficiles et il faut un élan de solidarité pour aider l’association. Tout ce qui a été construit en vingt-trois années ne peut pas s’effondrer par manque d’argent! Il en va de l’avenir, de la survie de milliers d’innocents.

On parle d’un anniversaire concernant Moi pour toit, qu’en est-il exactement? Oui et non. Oui, parce que Moi pour toit est devenu officiellement une fondation le 28 février 1991. Non, parce que l’action Moi pour toit avait débuté presque quatre ans auparavant. En fait, tout a commencé en novembre 1987 à travers diverses manifestations en faveur des enfants de la rue de Pereira en Colombie. Vu l’impact en Valais, j’ai donc décidé de légaliser ce mouvement devenu une fondation en 1991. Nous en sommes donc à notre 23e année de bataille quotidienne et incessante. Car un enfant de la rue, un enfant abusé, maltraité, battu, exploité n’a jamais de vacances. Il doit lutter tous les jours pour sa survie. Et nous aussi pour lui tendre la main et le coeur.

A l’heure de célébrer un parcours de vie, on a l’habitude de faire un bilan. Peut-on donner quelques chiffres ou doit-on parler uniquement de sentiments?

Il y a le bilan chiffré. Plus de 5000 enfants ont été accueillis dans nos quatre foyers, un pour les enfants âgés de 4 à 13 ans, deux pour les ados de 13 à 18 ans et le centre d’urgences Louis-Ernest Fellay pour tout âge, entre la naissance et 18 ans. On vient d’y accueillir deux bébés, de trois jours et de trois mois, déposés devant la porte. Et la semaine dernière deux cas dramatiques comme toujours: un enfant de 7 ans qui avait été enlevé par la guérilla et que la police a réussi à récupérer; et une petite fille de 8 ans qui avait été violée par son père et son beau-père avec l’assentiment de la mère. Elle s’est échappée de chez elle et est venue frapper à notre porte. Les mêmes tristes histoires se répètent depuis toujours. Et il y a l’autre bilan, à plus large vue. Moi pour toit en est à la deuxième génération d’enfants. C’est-à-dire que les premières petites filles accueillies dans notre premier foyer au début des années 1990 sont maintenant des mères de famille, mariées, avec qui j’ai toujours des contacts, qui m’appellent encore papa. Si l’on peut parler de réussite, c’est dans ces exemples-là qu’on peut la comprendre. Tout en étant conscient que c’est une lutte sans fin, de tous les jours, de tous les mois, de tous les ans.

Ces exemples nous laissent sans voix. Vous gardez pourtant le cap et continuez le combat. Avec quelle force?

La force de ne pas avoir le droit d’abandonner, tout simplement. On ne laisse pas tomber les plus faibles que je considère comme mes enfants. Alors je lance un nouvel appel pour récolter des fonds. Le budget avoisine le million de francs annuel. Une récente publication de la Confédération montre que la Fondation Moi pour toit est l’organisation suisse qui apporte le plus d’aide à la Colombie. Toutes institutions d’aide à l’enfance défavorisée confondues, Moi pour toit est le numéro un dans ce pays sud-américain pour être la plus complète. Car au-delà des quatre foyers, nous avons encore développé une école qui reçoit aussi les enfants des bidonvilles voisins, et un centre de formation professionnelle avec un diplôme reconnu par l’Etat colombien. Heureusement, ce dernier participe au budget à hauteur de 35% en 2010. Le reste des fonds vient de Suisse et surtout du Valais.

La crise économique n’a pas épargné la fondation…

Elle nous a frappés de plein fouet. Les chiffres 2009 viennent de sortir et la baisse des entrées atteint les 40%! Je n’ai jamais eu de matelas qui m’aurait permis de respirer et de travailler à moyen terme. Je vis presque au jour le jour. Plus précisément… au mois le mois. Aujourd’hui, j’ai trois mois de vie devant moi. C’est-à-dire que si plus un centime n’entre dans les caisses, je peux mettre la clé sous le paillasson en juin prochain. Si j’y pense, je suis envahi de sueurs froides. Je me dis qu’un projet de vingt-trois ans ne peut pas mourir ainsi. Mais j’ai la foi et l’espérance. J’y crois et je veux y croire et je me bats tous les jours avec cette conviction rivée au cœur.

Mais les Valaisans continuent de vous soutenir, en force?

Les Valaisans ont toujours été présents. J’espère qu’ils continueront à me faire confiance et à soutenir ces enfants qui le méritent. Dans cette crise, un élément me fait chaud au cœur. Les dons spontanés ont baissé de plus de 40%, mais les parrains, c’est-à-dire les membres du Club des mille, ont même connu une légère augmentation (+6,57%). C’est vrai que 20 francs par mois, soit 240 francs par année, restent dans les moyens de la majorité des personnes qui veulent donner la main à ces enfants, en sachant que c’est une aide directe, sous contrôle suisse du début à la fin. Un franc de don est un franc qui arrive sur le terrain directement. Et je suis là pour contrôler: en avril prochain, je fais mon 47e voyage à Pereira!

Dans ces conditions, comment envisager l’avenir, comment aborder l’année 2010?

Comme déjà dit, c’est le souci. Le gros souci. Je me retrouve dans la même situation qu’après le tsunami. J’avais alors poussé un grand cri. Au secours, au secours! Toute la générosité s’en allait en Asie. Cette année, le même problème se pose avec Haïti. C’est dramatique pour les Haïtiens, bien sûr. Et je le comprends. Mais les enfants de Moi pour toit, ceux qui sont encore dans la rue et qui attendent notre soutien, ne doivent pas et ne peuvent pas être abandonnés non plus. Alors que faire? Crier une nouvelle fois? Franchement, je me sens mal à l’aise. Pourtant, la situation est claire: j’ai besoin au minimum de 2000 francs par jour, tous les jours de l’année, et depuis un mois il n’y a que 20, 50 ou 200 francs qui entrent quotidiennement. Je vais rapidement arriver à un point de non-retour. Et je sens en moi comme une sorte d’impuissance. Je veux croire au miracle. C’est mon refuge. Et je ne devrais pas me sentir mal à l’aise, d’ailleurs. En 1991 et 1992, Moi pour toit n’avait pas l’ampleur actuelle en Colombie. J’offrais donc les 10% de nos entrées pour venir en aide à d’autres institutions qui avaient le même esprit d’aide directe. Et nous avions construit six centres de nutrition en Haïti, pour enfants de 1 à 3 ans. Le slogan de notre campagne était alors: «Ne pas oublier l’oubliée». Aujourd’hui, je souhaite que les généreux Valaisans n’oublient pas les enfants de Colombie.

MAG
La Gazette de Martigny

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